La clause de conscience en matière d’IVG, un antidote contre la trahison ? - Université Paris Nanterre Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Droit et Cultures Année : 2017

La clause de conscience en matière d’IVG, un antidote contre la trahison ?

Résumé

The legislator legalized abortion in 1975 thus rendering physicians the duty bearers of the new right conferred to women. Aware of the necessary balance between the adoption of the law and the collaboration of the medical professionals, he granted them the possibility to invoke the conscience clause to refrain from participating in a voluntary termination of pregnancy. Since then, the public authorities have paid a constant attention to improving the effectiveness of this right. This is the reason why a number of their legal and political interventions have consisted in facilitating women's access to abortion (lengthened time period, full social security coverage, elimination of the reflection period, exemption of parental authorization for minors, etc.). Nevertheless, the existence of the conscience clause has never really been called into question. This is all the more curious in that the invocation of this clause by a physician, hospital practitioner, constitutes an infringement to the principle of neutrality/secularism governing public services, to which acute attention is given nowadays. As such, with regard to abortion, the legislator is betraying certain basic principles of law so that physicians do not betray their personal convictions.
La clause de conscience en matière d'IVG, un antidote contre la trahison ? Tatiana Gründler Maître de conférences, Université Paris Nanterre Centre de théorie et d'analyse du droit, équipe CREDOF, UMR 7074 « Si les médecins, si les personnels sociaux, ou même un certain nombre de citoyens participent à ces actions illégales [avortements clandestins] c'est bien qu'ils s'y sentent contraints ; en opposition parfois avec leurs convictions personnelles, ils se trouvent confrontés à des situations de fait qu'ils ne peuvent ignorer » 1. Dans ce discours prononcé devant les députés par Simone Veil à l'automne 1974 lors de la présentation du projet de loi sur l'interruption volontaire de grossesse, la conscience, sans être nommée, occupe une place cruciale. La contrainte – à laquelle se réfère la ministre de la santé – pesant sur ceux qui se livrent à des actes alors sanctionnés pénalement est indiscutablement d'ordre moral tout comme les convictions personnelles antagoniques qui peuvent être les leurs. Le conflit potentiel ressenti par certains professionnels de santé entre l'obligation morale de répondre au besoin exprimé par une femme et l'interdit moral de porter atteinte à la vie, loin d'être nié, est affirmé et assumé par la ministre. Elle en tire argument pour souligner la force des demandes des femmes et la nécessité de ne plus sanctionner les personnes qui peuvent aller jusqu'à braver leur conscience pour y répondre. Le législateur en 1975 entend cela en votant une loi dépénalisant l'avortement sous certaines conditions. Il va même au-delà et prend en compte d'une autre manière la conscience des professionnels de santé en organisant son respect grâce à l'insertion dans le texte de ce qu'il est convenu de nommer clause de conscience : « Un médecin n'est jamais tenu de donner suite à une demande d'interruption de grossesse ni de pratiquer celle-ci […], aucune sage-femme, aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu'il soit, n'est tenu de concourir à une interruption de grossesse » 2. L'expression « clause de conscience » est absente du Code de la santé publique. Seules figurent quelques rares occurrences du terme « conscience » pour caractériser l'état d'une personne en fin de vie 3 , pour qualifier le soin qui doit animer le médecin dans son traitement des patients 4 ou encore pour dépeindre la qualité de l'appréciation à laquelle doit se livrer le médecin concernant la dénonciation de sévices subis par des personnes vulnérables 5 ou la non révélation d'un diagnostic 6 .
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

hal-01659412 , version 1 (08-12-2017)

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Citer

Tatiana Gründler. La clause de conscience en matière d’IVG, un antidote contre la trahison ?. Droit et Cultures, 2017, 74, pp.155-178. ⟨10.4000/droitcultures.4329⟩. ⟨hal-01659412⟩
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